Pourquoi la recherche nutritionnelle oublie les femmes : biais, lacunes et solutions
Dès les débuts de la médecine moderne, la femme a souvent été reléguée au second plan dans les protocoles, traitée comme une variante du « modèle masculin », comme si les différences physiologiques — hormones, cycle menstruel, grossesse, ménopause — pouvaient être ignorées sans nuisance. Cet article explore pourquoi la recherche nutritionnelle oublie encore les femmes. Quelles sont les conséquences (surpoids, obésité, diabète, cancérologie, etc.) et que peuvent faire les nutritionnistes comme Pascal Nourtier à Paris pour remédier à cette situation. Nous verrons les biais, les lacunes, les solutions, et l’importance capitale d’une recherche plus équitable. Le titre “Pourquoi la recherche nutritionnelle oublie les femmes : biais, lacunes et solutions” sera cité ici pour souligner le propos.
Les grands biais qui excluent ou minimisent les femmes
Exclusion des femmes en âge de procréer, grossesse et allaitement
Beaucoup d’essais cliniques de nutrition ou de médicament excluent automatiquement les femmes de « childbearing potential », c’est-à-dire en âge de procréer, pour peur des effets sur le fœtus. Par exemple, dans une revue de plus de 600 essais de phase 2-3 sur des médicaments pour le diabète de type 2, 59 % des protocoles avaient des critères d’exclusion liés à la fertilité, y compris l’exclusion de grossesse ou de l’allaitement.
Sous-représentation dans les effectifs, peu ou pas d’analyses selon le sexe
Même lorsque les femmes sont incluses, leur nombre peut être faible. Souvent les données ne sont pas ventilées selon le sexe ou selon des stades de vie (pré-ménopause, ménopause). Il en résulte que les résultats sont généralisés à toutes, bien que les réponses métaboliques, hormonales et nutritionnelles diffèrent.
Ignorance des variations biologiques propres
Le cycle menstruel, la variation hormonale, la grossesse, la ménopause : autant de facteurs qui modulent l’absorption, le stockage, la dépense énergétique, la sensibilité à l’insuline, etc. Pourtant peu d’études nutritionnelles tiennent compte de ces variations. Un protocole peut ne pas indiquer à quelle phase du cycle les mesures ont été faites, ou ne pas ajuster ses résultats.
Priorités de recherche et financement biaisés
Historiquement, les maladies cardiovasculaires, le cancer, le diabète ont été étudiés dans des populations mixtes ou masculines majoritaires. Or, les symptômes, la physiologie, la progression de la maladie peuvent différer chez les femmes. Le financement ou l’attention médiatique peuvent privilégier les scénarios généraux sans spécialisation selon le genre.
Questions socioculturelles, stigmatisation et accessibilité
Les normes sociales, les rôles de genre peuvent limiter la participation des femmes à certains essais (temps, responsabilités familiales), ou influencer la manière dont elles rapportent leur alimentation ou leur pratique de santé. Il y a aussi des préjugés dans la prise en charge médicale, parfois un manque de reconnaissance des symptômes moins typiques chez la femme (par exemple en cardiologie).
Les lacunes concrètes : que sait-on et que ne sait-on pas ?
Surpoids, obésité, résistance à l’insuline et diabète de type 2
Les taux d’obésité sont généralement plus élevés chez les femmes dans de nombreux pays. Des différences de distribution des graisses — femmes plus de graisse sous-cutanée, hommes plus de graisse viscérale — entraînent des risques métaboliques différents. Une étude montre que les modèles nutritionnels associés à l’adiposité totale ou régionale diffèrent selon le sexe : chez des adultes sud-africains, par exemple, un patron “animal et lipides” est plus fortement lié à l’IMC chez les hommes qu’aux femmes.
La sensibilité vasculaire à l’insuline est modifiée différemment selon le sexe pendant l’obésité et le diabète de type 2 : une étude a montré que la perte de poids améliorait cette sensibilité particulièrement chez les femmes.
Diabète gestationnel, grossesse
La grossesse représente une période particulièrement ignorée dans beaucoup de travaux nutritionnels : peu d’essais nutritionnels incluent des femmes enceintes pour des raisons éthiques et pratiques, mais cela crée un déficit de données sur le métabolisme, la nutrition, le risque de diabète gestationnel, surpoids fœtal, complications métaboliques, etc.
Cardiologie
Les maladies cardiovasculaires chez la femme peuvent se manifester différemment. Par exemple Il peut y avoir des symptômes moins typiques pour l’infarctus, une présentation tardive. Le manque de données spécifiques sur les femmes prive les praticiens d’indicateurs précis, de seuils adaptés, de protocoles de prévention optimisés.
Cancérologie
Des cancers liés à l’obésité comme le cancer de l’endomètre ou du sein post-ménopausique ont des liens nutritionnels puissants. Mais sans études bien conçues focalisées sur les femmes, les recommandations générales (perte de poids, activité physique, alimentation riche en fibres, faible en graisses saturées) peuvent manquer de précision pour différentes phases de vie.
Seniors
Chez les femmes âgées, les effets combinés de la ménopause, de la perte de masse musculaire, de la densité osseuse, de la modification hormonale rendent l’équilibre nutritionnel et métabolique très différent. Or les études sur la nutrition des seniors incluent moins souvent ce profil spécifique ou ne ventilent pas selon le sexe.
Anecdote ou fait historique
Au lendemain de la tragédie de la thalidomide dans les années 1950-60, un réflexe massif s’est installé dans la recherche : exclure systématiquement les femmes en âge de procréer des essais cliniques, pour éviter tout risque pour le fœtus. Paradoxe : cette exclusion a assuré que très peu de données furent récoltées par la suite pour savoir comment les médicaments ou interventions nutritionnelles agissent pendant la grossesse, ou chez les femmes enceintes. Ce réflexe protecteur a façonné, pour plusieurs décennies, une recherche centrée sur l’homme comme modèle de référence.
Conséquences : pourquoi c’est grave
Quand la recherche nutritionnelle oublie les femmes, ce sont des vies concrètes qui en pâtissent.
- Diagnostic tardif ou erroné de maladies métaboliques parce que les seuils ou symptômes standards sont basés sur des études masculines.
- Traitements ou recommandations alimentaires moins efficaces, voire inadaptés. Par exemple, perte de poids ou stratégies de régime qui fonctionnent différemment pour les hommes et pour les femmes.
- Risques accrus pendant la grossesse : diabète gestationnel, hypertension, prise de poids excessive, prédisposition pour l’enfant à l’obésité ou au diabète.
- En cancérologie, moins de données sur le métabolisme du cancer chez les femmes, sur les interactions alimentation-traitement selon le stade hormonal ou selon si la femme est pré- ou post-ménopausée.
Solutions : comment remédier
Conception des études : inclusion, stratification, phases de vie
Inclure dès le départ des femmes de tous âges : en âge de procréer, enceintes quand c’est pertinent, allaitantes, ménopausées. Stratifier les analyses selon le sexe, selon la phase du cycle menstruel, hormonal ou selon la grossesse, ou la ménopause.
Redéfinition des critères d’exclusion
Limiter les exclusions “par défaut” comme “femmes en âge de procréer”, sauf justification scientifique rigoureuse. Utiliser des protocoles adaptés pour la grossesse, ou des études spécifiques de nutrition maternelle.
Ajustements méthodologiques
Mesures répétées selon les phases hormonales, calibrage des doses ou apports selon les besoins spécifiques de la femme.
Tenir compte de la composition corporelle différente (masse grasse, masse maigre), de la distribution des graisses, du métabolisme hormonal.
Financement, incitations institutionnelles
Appels d’offre publics et privés qui exigent une représentation équilibrée des sexes, financement dédié à la nutrition des femmes, encouragement des publications à ventiler les résultats selon le sexe.
Rôle des nutritionnistes dans cette dynamique
Un nutritionniste professionnel comme Pascal Nourtier à Paris, qui reçoit en cabinet et en téléconsultation, a un rôle central :
- Sensibiliser ses clientes et patients aux différences biologiques et adapter les interventions diététiques selon leur phase de vie (ménopause, grossesse, etc.).
- Exiger des données scientifiques actuelles et vérifier si les recommandations proviennent d’études incluant des femmes.
- Participer, si possible, à des études cliniques ou à des collectifs qui promeuvent l’équité dans la recherche.
- Former ses pratiques professionnelles (évaluation, prescriptions, conseil alimentaire) sur la base de preuves spécifiques pour les femmes.
Lien spécifique avec obésité, diabète, grossesse et cancérologie
La recherche nutritionnelle oublie les femmes dans ces domaines particulièrement sensibles :
- Dans la grossesse, la nutrition joue un rôle fondamental pour prévenir le diabète gestationnel, le surpoids maternel, l’obésité infantile. Sans données solides, les recommandations pour les apports en macro- et micronutriments, limitation de la prise de poids gestationnelle, gestion du glucose restent approximatives.
- Dans le diabète de type 2, la progression vers l’insulinorésistance peut être modulée par les œstrogènes. Cela signifie que les femmes préménopausées peuvent avoir une courbe de risque différente, que la perte de poids ou les régimes peuvent avoir des réponses différentes selon le sexe.
- En cancérologie, les cancers sensibles aux hormones (sein, endomètre, ovaire) sont influencés par le poids, la composition corporelle, le stockage des graisses et l’inflammation. La nutrition avant, pendant, après le traitement est cruciale.
- Dans la cardiologie, la prévention primaire et secondaire, l’adaptation des seuils lipidiques, de tension, d’IMC ou de circonférence abdominale selon le sexe, sont souvent sous-étudiés pour les femmes.
Etude de cas fictive à Paris
Imaginons une patiente de 35 ans, enceinte de 20 semaines, avec surpoids modéré. Un protocole nutritionnel standard basé sur des études mixtes essentiellement masculines prescrit une réduction calorique modérée, conformément aux guides. Mais cette approche ne tient pas compte du fait qu’en grossesse, les besoins en fer, en protéines et certains micronutriments sont accrus. L’absorption intestinale qui change demande que la prise de poids limite soit adaptée. Le nutritionniste Pascal Nourtier à Paris, avec ses consultations en cabinet et en téléconsultation, pourrait moduler ce protocole : supplémenter selon besoin, mesurer les indicateurs de santé fœtale, adapter les apports selon le stade de grossesse, faire un suivi rapproché.
Conclusion
Pourquoi la recherche nutritionnelle oublie les femmes : biais, lacunes et solutions doit cesser d’être une expression, et devenir un engagement. Les différences biologiques, hormonales, les phases de vie — grossesse, ménopause — ne sont pas des détails. Elles sont centrales pour comprendre l’obésité, le diabète, la réponse aux régimes, le risque cancéreux. Les nutritionnistes, les chercheuses et chercheurs, les institutions doivent collaborer pour que les futures études soient inclusives, précises, utiles pour toutes.
Études citées
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